Texte intégral signé par Isabelle Hudon, présidente et chef de la direction de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, et publié dans le Voir du 1er novembre 2007.
ATTIRER, FORMER ET ENVOÛTER :
Une nouvelle approche pour retenir le talent
Alors que partout au Québec les projecteurs sont tournés vers des débats identitaires et que, de façon parfois malhabile, nous mettons en lumière nos différences, il me semble qu'il serait plus que pertinent d'équilibrer le débat et de rappeler l'apport inestimable de l'immigration à la société québécoise et tout particulièrement à Montréal. Les immigrants font bien plus que combler nos besoins directs de main-d'uvre; ils contribuent à nous enrichir d'une ressource précieuse et rare, la matière première de l'économie du savoir : le talent.
Pour l'avenir de la métropole, je le répète souvent : le talent est en quelque sorte le nerf de la guerre. Une société talentueuse, c'est une société capable à la fois de stimuler la créativité, de générer son innovation et, ultimement, d'attirer les investissements. Adhérant à la théorie qui dit que le talent attire l'investissement, je crois fermement que nous devons relever le défi d'attirer, de multiplier et de faire fructifier les talents.
Les statistiques et les prévisions nous le disent, d'ici quelques années à peine, 100 % de la croissance nette de la main-d'uvre sera attribuable à l'immigration. Ainsi, si notre performance à attirer le talent et à le garder ici n'est pas à la hauteur de nos besoins, la chose logique à faire n'est certainement pas de ne rien changer à nos pratiques
Bien au contraire, il faut innover.
Voilà une question intéressante : comment innove-t-on en matière d'attraction des immigrants ? Ma réponse : en développant la filière des étudiants internationaux.
Nos institutions d'enseignement supérieur sont déjà reconnues mondialement pour leur grande qualité; leur réputation n'est plus à faire. En fait, je crois que leur pouvoir d'attraction est encore plus puissant que l'on pourrait le croire, et cela, pour une raison bien simple : même s'ils viennent d'abord à Montréal pour étudier, les étudiants internationaux se trouvent dans bien des cas envoûtés par les charmes de la vie montréalaise. Tant et si bien que, pour plusieurs, essayer Montréal, c'est souvent l'adopter !
Plus précisément, nous savons déjà qu'un étudiant sur trois demeure à Montréal au terme de son diplôme, et cela, même s'il n'y a pratiquement aucune stratégie qui vise à accélérer son enracinement au Québec. Ceux qui décident de rester malgré les obstacles administratifs le font par amour pour la métropole : pour sa grande qualité de vie, sa diversité et son exceptionnel dynamisme culturel.
Bref, nos établissements d'enseignement supérieur, en particulier nos universités, sont un levier idéal pour déclencher le « coup de foudre » pour Montréal. Ils permettent à des étudiants étrangers curieux et, surtout, talentueux d'expérimenter notre métropole. Pourquoi alors ne pas utiliser encore davantage ce puissant levier ? Les avantages d'une telle démarche sont d'ailleurs très intéressants. On peut difficilement imaginer un meilleur environnement que les universités pour permettre aux nouveaux arrivants de développer un cercle social et un réseau de contacts fort. Qui plus est, c'est sans contredit le milieu idéal pour apprendre le français.
La beauté de la filière des étudiants étrangers est que toutes les pièces du casse-tête existent déjà. Il ne nous reste qu'à les assembler.
En toute logique, le premier geste à poser consiste à arrimer la promotion des études aux efforts d'attraction d'immigrants et à présenter Montréal comme une destination d'études et d'immigration. Le deuxième, tout aussi important, est d'encourager les étudiants à rester à Montréal après leurs études. Cela passe notamment par la simplification des démarches administratives pour l'obtention du statut de résident permanent de même que par la création de programmes d'intégration des étudiants étrangers au marché du travail, que ce soit à travers des échanges, des stages ou du maillage d'entreprise.
En fin de compte, si on augmente l'offre de talents, la demande doit aussi être au rendez-vous. Les entreprises doivent être beaucoup plus présentes sur les campus, non pas pour y vendre des produits, mais bien pour se faire connaître et faire découvrir aux futurs diplômés les possibilités d'emploi. Au-delà de leurs besoins économiques premiers en matière de main-d'uvre, les entreprises ont également leur part de responsabilité dans l'arrimage social et culturel des nouveaux travailleurs à la société montréalaise.
Car ne l'oublions pas, cet immense défi du talent est l'affaire de tous : sans talent, le savoir sera manquant et les investissements, absents !
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