Discours - conférencier :M. Claude Béchard, ministre du Développement économique, de l'Innovation et de l'ExportationMiser sur l'avantage québécois pour développer notre économie à l'échelle mondiale

Miser sur l'avantage québécois pour développer
notre économie à l'échelle mondiale

À quelques semaines du dévoilement de la nouvelle Stratégie gouvernementale de développement économique, je désire partager ma vision de l'avenir économique du Québec.

Des changements profonds obligent tous les acteurs économiques à avoir une réflexion renouvelée du développement économique. Il y a quelques années à peine, la valeur de notre dollar était de 60 cents américains, aujourd'hui, il flirte avec les 85 cents. Plus récemment, le prix de l'essence a littéralement bondi, il s'est heureusement replié au cours des derniers jours.

Le Québec a toujours eu de la concurrence, mais la montée en force des économies émergentes comme celles de la Chine et de l'Inde font en sorte que la concurrence est plus vive que jamais. Auparavant, la concurrence touchait surtout les secteurs plus traditionnels comme le textile. Elle s'étend maintenant à d'autres secteurs puisque ces pays maîtrisent les technologies et ont des capacités de recherche très importantes.

Un autre aspect de notre environnement économique a trait à la durée de vie utile d'un nouveau produit. Cette durée de vie est quatre fois plus courte qu'il y a 40 ans. Il n'est donc plus possible de nos jours de développer un produit et de se croiser les bras. Il faut innover constamment.

Il nous faut finalement tenir compte de l'aspect démographique propre au Québec. En 1966, on comptait huit travailleurs pour un retraité. En 2001, on en comptait cinq pour une personne retraitée. En 2026, cette proportion passera à deux travailleurs pour une personne retraitée. Le Québec sera à la recherche de 640 000 emplois entre 2004 et 2008. Le taux de chômage reflétera donc notre capacité à combler les emplois disponibles.

Deux principes d'action guident la vision du développement économique du Québec. Le premier principe, c'est que le secteur privé est le moteur du développement économique. Le deuxième principe, c'est que l'État québécois n'est pas un entrepreneur. Son rôle est de soutenir les entrepreneurs et le développement des entreprises.

Le gouvernement est disposé à aider techniquement et financièrement un projet, mais nous exigerons toujours que les partenaires privés participent de manière significative au financement du projet et qu'ils en soient les maîtres d'œuvre afin d'éviter des situations catastrophiques comme celle de la Société Papiers Gaspésia à Chandler. C'est dans cette optique que nous avons revu les rôles des sociétés d'État et plus spécialement ceux de la Société générale de financement (SGF) et d'Investissement Québec.

Cette révision en profondeur a permis à la SGF de réduire de 10 fois la taille de sa perte financière, soit de 511 M$ en 2003 à 50 M$ en 2004. Je suis confiant que la SGF renouvellera avec la profitabilité en 2005. Pour sa part, Investissement Québec autofinancera entièrement ses frais d'administration à compter de 2008, alors que la contribution gouvernementale était de 27,6 M$ en 2002-2003.

Ces redressements spectaculaires permettront à la SGF et à Investissement Québec de jouer un rôle très actif dans le développement des entreprises, puisque la SGF prévoit prendre des participations dans des projets privés d'investissement pour un montant de 200 M$ à 300 M$ annuellement, et Investissement Québec continuera de soutenir, chaque année, plus de 1 000 projets dans les PME partout au Québec.

Une nouvelle vision du développement économique

Des changements aussi importants nous interpellent tous et pas uniquement le gouvernement. Je vous propose une vision renouvelée et moderne de l'avenir économique du Québec.

Je vous propose de miser sur les avantages du Québec, sur les avantages stratégiques du Québec, sur les avantages qui vont nous permettre de positionner le Québec à l'échelle internationale dans les années à venir. Voici les neuf grands avantages de l'économie québécoise.

1. Un environnement d'affaires compétitif

Quelques données :

  • Accès privilégié à une zone commerciale de plus de 400 millions de consommateurs.
  • Longue tradition d'association et de partenariat entre le secteur privé et le secteur public.
  • Une qualité de vie reconnue. Montréal se classe au quatrième rang des métropoles nord-américaines en termes de qualité de vie.
  • De plus, la vie culturelle de Montréal est reconnue à l'échelle internationale ce qui constitue un facteur d'attraction pour les entreprises et les travailleurs.

La culture joue un rôle essentiel pour l'économie québécoise et montréalaise. La culture et les communications créent quelque 177 000 emplois et représentent quelque 13,6 milliards de dollars.

Le Québec est un endroit propice aux affaires. Toutefois, certaines faiblesses sont fréquemment montrées du doigt notamment les lourdeurs administratives et réglementaires imposées aux entreprises et la complexité de l'appareil d'État.

Auparavant, les entreprises consacraient beaucoup trop de temps à remplir de la paperasse pour répondre aux exigences gouvernementales. Depuis 2003, nous avons réduit de 15 % les formalités administratives gouvernementales afin de laisser plus de temps et donc plus d'argent aux dirigeants pour travailler au développement de leur entreprise. Il nous faut aller encore plus loin.

2. Les conditions économiques qui favorisent l'investissement

Quelques données :

  • Notre économie est moderne, diversifiée et elle offre de multiples occasions d'affaires.
  • Ressources naturelles abondantes (hydroélectricité, eau, développement de l'énergie éolienne).
  • On compte au Québec plus de 1 200 entreprises de propriété étrangère qui ont choisi de s'implanter et de se développer en sol québécois.

Un entrepreneur sérieux avec un projet sérieux aura toujours accès à des sources de financement. SGF, Investissement Québec, les fonds FIER, les fonds de capital de risque. La privatisation de la Société Innovatech du Grand Montréal a d'ailleurs permis l'ajout de 200 M$ en capital de risque. Pour les bons projets, il y a de l'argent.

On a déjà annoncé la mise en place de huit Fonds d'investissement en région ( FIER-Régions) et neuf autres seront annoncés sous peu. L'engouement pour les FIER-RÉGIONS a fait en sorte que nous avons dû, lors du dernier discours sur le budget, porter de 78 M$ à 156 M$. Rappelons que le gouvernement investit dans ces FIER deux dollars pour chaque dollar consenti par le secteur privé. Les FIER Montréal seront annoncés sous peu.

3. Le Québec est un chef de file en recherche et en innovation

Quelques données :

  • En 2002, 2,67 % de notre PIB – un niveau plus élevé que la moyenne des pays de l'OCDE.
  • Des chercheurs, des universités et des centres de recherche de calibre mondial.
  • Des mesures fiscales d'incitation à la R & D parmi les plus compétitives au monde.
  • Une main-d'œuvre hautement scolarisée.

Le 30 mai dernier à Montréal, j'ai participé à un important colloque sur la recherche et l'innovation qui réunissait quelque 200 représentants d'entreprises et du monde de la recherche. Je suis particulièrement heureux de vous annoncer aujourd'hui que nous allons donner suite à l'une de leurs recommandations en mettant en place, d'ici la fin de l'année 2005, le Conseil des partenaires de l'innovation. Il s'agira d'un lieu privilégié de consultation et de validation sur les choix en matière de recherche et d'innovation.

4. Une main-d'œuvre compétente

Quelques données :

  • Un système d'éducation complet, facilement accessible sur l'ensemble des territoires du Québec.
  • Des programmes sociaux généreux qui représentent un atout important tant pour les employeurs que pour les travailleurs.
  • Plus de 40 % des Québécois parlent le français et l'anglais : dans la région de Montréal, cette proportion atteint 53 %; de plus, 13 % parlent une troisième langue.

Quoi qu'on en dise, les services de garde à 7 $, c'est un avantage. Le programme soutien aux enfants et notre système de santé gratuit sont tous des facteurs d'attraction et de rétention.

5. Des PME au cœur du développement économique

Les PME sont les piliers de l'économie québécoise. L'avantage québécois pour ces PME, c'est de pouvoir disposer d'infrastructures solides pour les accompagner et les soutenir. Par exemple, un réseau complet de CLD offre des services de première ligne à ces entreprises.

De plus, le ministère du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation, a regroupé, depuis les deux dernières années, quelque 160 mesures et programmes en 10 programmes souples, peu normés et adaptables aux besoins variés des entreprises. Maintenant, avec la phase 2 du Portail gouvernemental de services aux entreprises, notre objectif est toujours le même: faciliter la vie aux entrepreneurs québécois et, en ce sens, devenir un modèle non seulement canadien, mais nord-américain.

Dès janvier 2006, chaque entrepreneur sérieux avec un projet sérieux aura à sa disposition un chargé de projet pour l'aider à cheminer dans son projet. Je souhaite, par cette nouvelle façon de faire, que l'entrepreneur n'ait plus à parler à 15 personnes dans huit ministères. Votre chargé de projet fera ce travail avec vous et vous savez quoi, moi aussi je pourrai parler à votre chargé de projet.

6. Une économie tournée vers l'exportation

Quelques données :

  • 1,1 million d'emplois sont liés aux exportations.
  • 9 000 exportateurs vendent des biens sur les marchés étrangers.
  • Des occasions d'affaires extraordinaires.
  • Deux milliards de consommateurs se rajoutent à l'économie mondiale avec l'émergence de l'Inde et de la Chine.

À cet effet, plus de 150 personnes venant de partout au Québec accompagneront le premier ministre Jean Charest et moi, du 21 au 29 septembre prochains à la Mission Québec-Chine, il s'agira de la plus importante mission économique que le Québec ait connue.

Il ne s'agit pas de 1,3 milliard de concurrents, mais plutôt de 1,3 milliard de clients. Par exemple, nous souhaitons que le gouvernement chinois donne son accord définitif au Canada comme destination touristique. Nul doute que nous attirerons une large part de cette nouvelle clientèle et que nous ferons découvrir les plus beaux attraits des régions du Québec.

Par ailleurs, nous allons développer des missions éclairs sur le marché américain qui compte pour plus de 80 % de nos exportations. Auparavant, les missions du Québec à l'étranger avaient plus souvent des objectifs politiques comme pour aller chercher des appuis pour la souveraineté du Québec, que des objectifs économiques. Depuis notre arrivée au pouvoir, nos missions visent le développement de notre économie.

7. Des secteurs clés bien implantés

L'approche des grappes industrielles, à l'époque du gouvernement de Robert Bourassa, a fait en sorte que le Québec a adopté une vision commune des grands enjeux de leur secteur. Le Québec possède des avantages dans plusieurs secteurs et plus particulièrement la grande région de Montréal avec ses grands secteurs économiques de classe mondiale.

Montréal se classe au 8 e rang des grandes régions métropolitaines nord-américaines dans le secteur biopharmaceutique. Près de la moitié des firmes pharmaceutiques sont à Montréal. Des médicaments reconnus et utilisés mondialement ont été découverts et mis au point au Québec.

Les technologies de l'information constituent également un secteur d'excellence. Montréal accueille une masse critique d'entreprises dont plusieurs leaders mondiaux en matière de fabrication et de recherche dans le créneau des télécommunications sans fil. IBM Canada a annoncé la création d'un important centre international d'Excellence PLM (Product Life Management) à Montréal, dont Bombardier aéronautique sera le premier client. La création de ce centre d'excellence amènera 200 nouveaux emplois.

Il y a quelques années, on allait jusqu'à refuser l'aide gouvernementale fédérale sur la base de principes politiques. On a trop longtemps pratiqué la politique de la chaise vide du fédéral au détriment des entrepreneurs. Notre gouvernement a choisi de s'entendre avec le gouvernement fédéral tout en continuant à faire valoir nos droits et à défendre les intérêts du Québec.

À preuve, j'ai eu des discussions avec les ministres Jacques Saada et Jean Lapierre afin de développer une entente-cadre de développement économique pour reconvertir des secteurs fragilisés par des situations exceptionnelles notamment la forêt, le textile et le meuble, auxquels il faudra des réponses exceptionnelles.

8. Des ressources énergétiques abondantes et renouvelables

Tirer profit de nos avantages, ça signifie avoir une vision renouvelée de l'exploitation de nos ressources naturelles. Jusqu'à récemment, on a considéré l'exploitation de l'hydroélectricité dans l'optique de répondre aux besoins des Québécoises et des Québécois. Si l'Alberta avait eu cette même vision, elle ne posséderait certainement pas les grandes richesses qu'on lui connaît. Je crois donc qu'il faut que nous examinions l'exploitation de nos richesses naturelles avec lucidité.

Au cours de la dernière décennie, on a freiné le développement du potentiel énergétique du Québec. Pour réparer cette situation, notre gouvernement s'est résolument engagé à accroître la capacité hydroélectrique et éolienne du Québec.

9. Une métropole, une capitale et des régions dynamiques et ouvertes aux affaires

La grande région de Montréal constitue la locomotive du développement économique québécois. Ainsi, Montréal ne peut vivre sans les autres régions et les régions ne peuvent vivre sans Montréal. Le plus bel exemple que je peux vous fournir pour illustrer mes propos, c'est celui du remplacement prochain des voitures du métro de Montréal.

La construction de ces voitures permettrait à nos entreprises dans les régions du Québec non seulement de consolider ou de créer des emplois, mais également de développer leur expertise et d'avoir recours à leur capacité d'innovation et leur savoir-faire. Pour Montréal, cela représente un métro à son image : moderne, efficace et dynamique. Montréal est le premier lieu d'exportation des régions, c'est la première marche vers les États-Unis, c'est la première marche vers le monde.

Pour gagner, pour être parmi les meilleurs, il faut faire équipe et la Stratégie gouvernementale de développement économique reposera sur la mobilisation de tous les acteurs économiques. Ainsi, j'ai demandé à la SGF de mettre en place un réseau de partenaires privés visant le développement et la recherche d'investissements étrangers. Par exemple, nos grandes firmes d'avocats, d'ingénieurs, de comptables et les banquiers doivent bâtir un réseau de contacts qui identifiera les projets et les investissements que les Québécois peuvent faire à l'étranger et surtout que les étrangers peuvent faire au Québec.

Je vous lance aujourd'hui une invitation toute particulière. Prenez une heure pour le Québec.

Durant vos déplacements à l'étranger, dans les grands dossiers que vous avez à traiter avec d'autres pays, prenez une heure pour faire connaître les avantages du Québec. Prenez une heure pour nous. Prenez une heure pour nos jeunes. Prenez une heure pour l'avenir. Prenez une heure pour le Québec.

À vous tous qui faites des affaires partout dans le monde, prenez une heure pour parler à vos collègues des autres pays de nos grandes réalisations comme nos barrages hydroélectriques et de notre capacité énergétique. Prenez une heure pour leur faire connaître notre talent, notre créativité, notre dynamisme culturel, qui ont fait en sorte que Simple Plan est connu à travers le monde et que le Cirque du Soleil a réinvité le cirque. Prenez une heure pour leur parler de notre merveilleuse qualité de vie, nos programmes sociaux, nos systèmes de santé et d'éducation.

Au cours des prochaines semaines, j'aurai le plaisir de rendre publique non pas un budget, mais une stratégie de développement économique et de dévoiler des cibles à la fois ambitieuses et réalistes que nous atteindrons ensemble d'ici 2010. Nous allons gérer par des objectifs et ensemble, nous allons prendre les moyens pour les atteindre.

Je ferai connaître également notre nouvelle stratégie de promotion des investissements étrangers afin d'aller chercher les investissements au lieu d'attendre que ceux-ci viennent à nous.

Nous allons aussi mettre à jour la Politique québécoise de la science et de l'innovation avec le Conseil des partenaires de l'innovation. Voilà le plan de match pour les mois à venir. Une série de gestes significatifs et concrets qui vont nous amener à miser sur l'avantage québécois.

En terminant, on entend beaucoup parler, ces jours-ci, de projet de société et de date de référendum. Comme plusieurs d'entre vous, je ne souhaite pas que Montréal soit la métropole d'un Québec divisé, tourné vers le passé et qu'on entende les mêmes chicanes qui nous divisent et nous affaiblissent depuis 40 ans. Voyons plus loin, fixons nous comme objectif que Montréal redevienne d'ici 2025, rien de moins que ce qu'elle a déjà été, soit la métropole économique au Canada.

Le Québec a réalisé des progrès considérables dans tous les domaines depuis la révolution tranquille. L'économie du Québec s'est diversifiée, elle s'est ouverte sur le monde et cette évolution a permis de relever de façon appréciable le niveau de vie de la population. Toutefois, la société québécoise doit faire plus et mieux si elle veut poursuivre l'amélioration de ses systèmes de santé, d'éducation et de protection sociale et culturelle. Le Québec doit donc miser sur ses avantages pour assurer son développement économique à l'échelle mondiale.

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