Discours prononcé par M. Pierre Bourque
Maire de Montréal
Le 19 septembre 2000 UNE ÎLE
UNE VILLE
SOIXANTE-TROIS DISTRICTS
NEUF ARRONDISSEMENTS
PROPOSITION POUR UN REDÉCOUPAGE TERRITORIAL ET UNE RÉORGANISATION POLITIQUE ET ADMINISTRATIVE DE LA FUTURE MÉTROPOLE
SOMMAIRE DE L'ALLOCUTION DU MAIRE DE MONTRÉAL PRONONCÉE À L'OCCASION DU DÉJEUNER-CAUSERIE DE LA CHAMBRE DE COMMERCE DU MONTRÉAL MÉTROPOLITAIN
Notre fierté : la qualité de vie
Actuellement, l'économie montréalaise a le vent dans les voiles, et l'avenir s'annonce très prometteur pour la métropole du Québec. De plus en plus de gens reviennent habiter en ville et de nombreux entrepreneurs choisissent Montréal comme étendard international. Les raisons de ce succès peuvent être résumées en deux caractéristiques bien connuesÿ: la qualité de vie et la nouvelle économie.
La qualité de vie montréalaise jouit d'une renommée méritée. Une ambiance chaleureuse, des rues très sécuritaires, une abondance de festivals et d'événements internationaux, de la verdure à profusion, un rythme américain combiné à un style européen, tout cela confère à Montréal un art de vivre unique et des plus stimulants.
Notre force : la nouvelle économie
Montréal connaît aussi un bel essor économique. Les entreprises qui, au début des années 1990, se sont restructurées et modernisées pour faire face au libre-échange, récoltent maintenant les fruits de leurs efforts. Par ailleurs, le soutien gouvernemental et municipal à la nouvelle économie a fait de cette dernière le nouveau fer de lance montréalais.
Les résultats de ces changements sont éloquents. Entre 1997 et 2000, le taux de chômage a chuté de 11,4% à 7,1%. Entre 1974 et 1995, la part des exportations pour l'ensemble de la production des biens et services est passé de 12,7% à 42,9%. De plus, selon un récent rapport du Conference Board of Canada, Montréal devrait connaître, à compter de 2001, la plus forte croissance parmi les régions urbaines du Canada; en 2004, le chômage pourrait y être aussi bas que 5,6%. À la base de cette croissance : les télécommunications et l'aérospatiale.
Le parti pris de Montréal pour la nouvelle économie est très avantageux. Aujourd'hui, Montréal affiche la plus forte concentration d'emplois dans les technologies de pointe en Amérique du Nord et les produits de cette industrie constituent les principales exportations montréalaises. De fait, en juillet 2000, le réputé magazine Wired a classé Montréal parmi les villes les plus dynamiques en matière de technologies de pointe, une reconnaissance unique au Canada.
Notre défi : une métropole forte
Les centres urbains, pôles de développement
Pour que toutes ces promesses d'avenir se réalisent, Montréal doit renforcer sa position au sein des grandes métropoles du monde. Il est bien connu que les centres urbains sont en voie de devenir les principaux lieux d'échanges économiques, nonobstant les frontières nationales. Dans cet esprit, à Toronto comme à Ottawa, villes-centres et municipalités périphériques ont choisi de se regrouper afin de se donner une cohésion d'action et de développement.
Le regroupement des villes, une idée en progression
En tant que métropole du Québec, Montréal doit assurer un leadership vigoureux qui se répercute sur les scènes nationale et internationale et qui profite à l'ensemble des Québécois. Voilà pourquoi il est si important de consolider le noyau urbain du Grand Montréal par le regroupement de toutes les villes de l'île. Cette idée a beaucoup progressé au cours des dix-huit derniers mois.
Avril 1999 - La Commission nationale sur les finances et la fiscalité locales, ou Commission Bédard, dépose son rapport. Le rapport propose notamment des projets de restructuration locale à l'échelle du Québec.
Mai 1999 - Le maire de Montréal, Pierre Bourque, rend publique la proposition Une île, une ville devant la Chambre de commerce du Montréal Métropolitain. Depuis, de nombreuses rencontres avec des élus, des représentants gouvernementaux et des citoyens ont convaincu de la nécessité d'un changement et suscité de nombreux appuis au projet de regrouper toutes les municipalités de l'île.
Décembre 1999 - La Ville de Montréal tient une journée d'étude sur le projet Une île, une ville à l'Université du Québec à Montréal. Plus de 500 personnes y participent.
Mars 2000 - Louise Harel, ministre des Affaires municipales et de la Métropole, charge Louis Bernard de créer un comité aviseur. Formé des principaux maires de la région de Montréal, ce comité a deux mandats, soit de proposer une liste de responsabilités pour la future Communauté métropolitaine de Montréal et d'étudier divers scénarios de regroupements sur l'île de Montréal, ainsi que la Rive-Nord et la Rive-Sud. Les travaux prendront fin en septembre 2000 et le rapport sera déposé en octobre de la même année.
Avril 2000 - La ministre Harel dépose un livre blanc sur la réforme municipale. Le document fixe les objectifs, les principes et les balises devant conduire à une réduction significative du nombre de municipalités au Québec.
Juin 2000 - L'Assemblée nationale adopte la loi créant la Communauté métropolitaine de Montréal. Cette nouvelle instance répond à la demande de la Ville de Montréal d'élargir le territoire de la Communauté urbaine de Montréal.
Juillet 2000 - Louis Bernard soumet à l'étude du comité aviseur une proposition de regroupement des villes de l'île.
Septembre 2000 - Le maire Bourque rend publique devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain sa proposition de découpage territorial et le mode de gestion de la future ville.
Notre avantage : la Communauté métropolitaine de Montréal
Pour une vision régionale du développement
Depuis la création de la CUM, en 1970, les enjeux métropolitains se sont étendus jusqu'à dépasser de beaucoup l'île de Montréal. Aussi, le gouvernement du Québec a-t-il créé la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM), une instance qui doit contribuer à donner une vision globale de développement à la grande région métropolitaine.
Une structure et des responsabilités claires
La CMM, qui entrera en fonction le 1er janvier 2001, regroupera les 105 municipalités actuelles de la région métropolitaine, ce qui représente quelque 3,3 millions d'habitants. Elle sera dotée d'une structure légère dirigée par 28 élus municipaux et aura, pour l'essentiel, un rôle de planification. Ses responsabilités toucheront les domaines suivants :
- transport en commun;
- aménagement du territoire;
- promotion du développement économique;
- financement d'équipements régionaux;
- uniformisation des normes environnementales;
- habitations à loyer modique.
Notre avenir : une île, une ville
La «proposition Bernard»
La CMM créée, il reste à réorganiser les municipalités de la région métropolitaine. À cette fin, le comité aviseur présidé par Louis Bernard recommandera sous peu une avenue de réorganisation territoriale au gouvernement du Québec. Déjà toutefois, une proposition soumise à l'attention du comité circule sur la place publique.
La «proposition Bernard» contient des éléments avec lesquels la Ville de Montréal est totalement en accord. Ainsi, elle reconnaît le principe Une île, une ville; elle propose l'élection d'un maire au suffrage universel pour toute l'île; elle reconnaît la nécessité de centraliser plusieurs grandes fonctions municipales et les identifie; elle propose la gestion territoriale et le découpage en arrondissements de manière à rapprocher des citoyens la prestation des services. Nous réitérons notre appui à ces principes qui sont parties intégrantes du projet Une île, une ville.
La «proposition Bernard» est cependant porteuse de difficultés, soit :
Le redécoupage de l'île en 29 arrondissements de poids inégaux et structurés en entités administratives et politiques autonomes (des quasi-municipalités) ferait naître forcément un climat de compétition et de rivalités avec l'administration centrale. De plus, il impliquerait le démantèlement pur et simple de l'actuel territoire de Montréal.
Le leadership de la métropole serait fortement menacé par le maintien de 29 entités municipales. Au sein de la CMM, la Nouvelle Ville serait affaiblie par rapport à des centres urbains tels que Laval et, probablement, la Rive-sud. À l'échelle nationale, elle serait aussi désavantagée face à des villes unifiées comme Toronto, Halifax et Ottawa.
Le dédoublement des centres de décision provoquerait des conflits puisque les arrondissements, dont les maires siégeraient au conseil municipal de la Ville, auraient un droit de regard sur toutes les affaires de la métropole alors qu'inversement, la conseil n'aurait aucun pouvoir sur les décisions d'un arrondissement. Par ailleurs, le citoyen devrait composer avec un système démocratique beaucoup plus complexe.
Le double pouvoir de taxation augmenterait de toute évidence le fardeau fiscal des contribuables et maintiendrait l'iniquité fiscale.
Les conventions collectives se multiplieraient, suivant en cela le morcellement de la ville-centre et le dédoublement du pouvoir politique, ce qui complexifierait d'autant la gestion municipale.
LA PROPOSITION DU MAIRE DE MONTRÉAL
Dans le but de faire avancer encore la réflexion, le maire de Montréal, Pierre Bourque, soumet un nouveau projet de réorganisation territoriale. Cette proposition se fonde sur la double nécessité de décentraliser efficacement les pouvoirs locaux et d'instaurer des pouvoirs centraux capables de prendre en charge les responsabilités se rapportant à toute l'île de Montréal.
UNE ÎLE, UNE VILLE, 63 DISTRICTS
La ville qui s'étendra sur toute l'île de Montréal devra être dotée d'une structure politique centrale qui valorise prioritairement l'imputabilité démocratique, le partage du fardeau fiscal, l'unité d'action en matière de développement économique et l'augmentation des ressources destinées au développement social.
À cette fin, la ville sera divisée en 63 districts électoraux, chacun comptant quelque 30 000 habitants. Élus au suffrage universel, le maire et les 63 conseillers municipaux formeront un conseil municipal, lequel choisira sur recommandation du maire, les neuf membres du comité exécutif. La ville utilisera le français comme langue officielle et dispensera les services en anglais là où ils sont requis et s'engage à respecter les droits acquis en cette matière.
Forte d'une vision d'ensemble, la structure politique et administrative centrale sera responsable des services qui nécessitent une planification et une action à l'échelle de la ville, tels que :
- la direction générale;
- la prévention des incendies et la police;
- l'urbanisme : plan directeur et grands projets de développement;
- les infrastructures de base (réseau d'aqueduc, usines d'épuration et de filtration, rues, égouts, réseau électrique souterrain);
- la gestion des grands équipements et des grands parcs;
- les programmes d'aide aux entreprises;
- le soutien aux grands événements culturels;
- finances et évaluation foncière.
UNE ÎLE, UNE VILLE, 9 ARRONDISSEMENTS
Au sein de la ville, des entités politiques et administratives plus proches du citoyen seront créées. Ces arrondissements permettront d'offrir des services de proximité plus variés et contribueront à préserver l'héritage culturel et historique des communautés montréalaises.
Ainsi, Montréal sera divisé en neuf arrondissements. Chaque arrondissement comptera environ
200 000 habitants. Il sera présenté par sept élus municipaux qui agiront à titre de conseillers de district. Parmi ceux-ci, un président de conseil d'arrondissement sera nommé par le conseil municipal, sur recommandation du maire de la ville et après discussion avec les sept élus d'arrondissement. Le maire de la ville sera membre des conseils d'arrondissement.
Les arrondissements seront chargés des services qui nécessitent une gestion locale, ce qui permettra d'améliorer la prestation des services aux citoyens et de mieux comprendre les besoins des diverses communautés. Ces services seront :
- les sports, les loisirs et le développement social;
- l'urbanisme : zonage et permis;
- les bibliothèques et les maisons de la culture;
- l'entretien, le nettoyage et la signalisation de la voirie;
- l'entretien des parcs;
- l'administration des conseils d'arrondissement;
- les horaires des collectes de déchets et des collectes sélectives, etc.
UN BUDGET DE 3,2 MILLIARDS DE DOLLARS
La Ville de Montréal disposera alors d'un budget total de 3,2 milliards de dollars, dont 2,2 milliards seront consacrés aux services centraux et 1 milliard, aux services locaux.
Cette proposition entraînerait des économies de 115 millions de dollars par année et se traduirait en baisses de taxes pour environ 75% des résidants de l'île.
Les avantages de la proposition du maire de Montréal
La nouvelle proposition du maire de Montréal comporte plusieurs avantages, notamment :
- de consolider le leadership de la métropole par la mise en commun des talents et des ressources indispensables en cette ère de mondialisation, de manière à accélérer la croissance économique, à solutionner les problèmes sociaux et à renforcer, de façon générale, la société montréalaise;
- de fortifier la démocratie municipale en décentralisant les services aux citoyens, en rendant les élus locaux imputables de leurs décisions, en simplifiant la structure politique actuelle, en encourageant les citoyens à participer à la vie de leur arrondissement;
- d'économiser des millions de dollars en diminuant substantiellement le nombre d'élus, en éliminant le dédoublement de services et en intégrant les systèmes (achats, personnel et finances) et en réorganisant la maind'oeuvre en vue d'une plus grande efficacité;
- d'offrir progressivement les mêmes services de qualité dans toute l'île en utilisant les meilleures expertises de l'île, en mettant à la disposition de tous les résidants les installations récréotouristiques montréalaises de calibre international et en tablant sur la satisfaction de 80% des Montréalais à l'égard des services municipaux tel qu'un récent sondage l'a démontré;
- d'établir une plus grande équité entre les résidants de l'île en répartissant la charge fiscale de façon plus juste. De fait, 75% des résidants de l'île profiteront de réductions de taxes;
- de renforcer le sentiment d'appartenance des résidants de l'île, d'abord à leur communauté en reconnaissant les identités locales et en décentralisant des services et des pouvoirs puis à leur métropole en donnant à celleci une véritable cohésion d'action.
Notre personnalité : neuf arrondissements
Chaque arrondissement montréalais sera formé en tenant compte des spécificités locales et formera un tout harmonieux au sein de la métropole.
1er arrondissement CENTRE-VILLE
Outremont, Plateau-Mont-Royal, Ville-Marie, Westmount
2e arrondissement CENTRE-NORD
Parc-Extension, Petite-Patrie, Saint-Michel, Villeray
3e arrondissement NORD
Ahuntsic, Anjou (ouest), Montréal-Nord, Saint-Léonard (nord)
4e arrondissement CENTRE-EST
Hochelaga-Maisonneuve, Mercier (ouest), Nouveau-Rosemont, Rosemont, Saint-Léonard (sud)
5e arrondissement EST
Anjou (est), Mercier (est), Montréal-Est, Pointe-aux-Trembles, Rivière-des-Prairies
6e arrondissement CENTRE-OUEST
Côte-des-Neiges, Côte-Saint-Luc, Hampstead, Montréal-Ouest, Notre-Dame-de-Grâce
7e arrondissement NORD-OUEST
Cartierville, Dorval, Lachine (Saint-Pierre), L'Île Dorval, Saint-Laurent, Mont-Royal
8e arrondissement SUD-OUEST
LaSalle, Sud-Ouest, Verdun
9e arrondissement OUEST
Baie-d'Urfé, Beaconsfield, Dollard-des-Ormeaux, Kirkland, Île Bizard, Pierrefonds, Pointe-Claire, Roxboro, Sainte-Anne-de Bellevue, Sainte-Geneviève, Senneville
À l'heure où les échanges économiques se font de plus en plus entre grandes métropoles, et non pas entre pays, Montréal doit posséder la stature politique nécessaire pour prendre sa place sur l'échiquier mondial.
La proposition du maire Bourque contient tous les éléments susceptibles de faire de Montréal une ville modèle du 21e siècle qui attire les investissements internationaux et favorise l'équité sociale.
Déjà, 74% des résidants de l'île disent se sentir Montréalais. Ce sentiment n'est guère surprenant puisque tous partagent les mêmes intérêts et participent à l'avenir de la métropole et, par conséquent, à celui du Québec. Il est maintenant temps de se donner les moyens d'assurer cet avenir.
Nous sommes tous Montréalais.