Normand Legault, président, Chambre de commerce du Montréal métropolitain Montréal, le 18 octobre 2000 Le projet d'investissement de la société taïwanaise Mosel Vitelic en partenariat avec la Société générale de financement suscite un véritable débat public. Au sein de la communauté d'affaires de la région métropolitaine, le projet ne fait pas complètement l'unanimité, mais nous croyons représenter l'opinion des gens d'affaires en répondant «Mosel Vitelic ! Pourquoi pas ?» Mosel Vitelic fabrique des composantes électroniques, circuits imprimés, semi-conducteurs et micro-processeurs utilisés tant dans certains ordinateurs que dans les futurs appareils téléphoniques hybrides permettant d'accéder à Internet. Cette société projette d'établir à Montréal une usine de fabrication de circuits de grandes dimensions et de haute densité, destinés de façon primordiale à des systèmes qui connaîtront leur apogée vers 2004 et 2005. Il y a plusieurs années que les études et les plans des gouvernements et des services de promotion économique de la région de Montréal souhaitent attirer ici un grand fabricant de taille mondiale pour produire ce type de composantes. On estime qu'il s'agit là d'un élément valable dans la structure d'une ville de haute technologie diversifiée en matière de technologies de l'information et de télécommunications, deux mondes technologiques convergents. Par ailleurs, le projet Mosel Vitelic représente en soi la création de milliers d'emplois reliés à l'industrie des technologies de l'information dont, affirment les promoteurs, quelques centaines d'emplois de haut niveau. Jusque là, même si la première phase de ce projet comporte surtout des emplois dans un univers technologique relativement traditionnel, tout milite en faveur de cet investissement et les milieux d'affaires ne peuvent que se réjouir de la diversification d'un secteur économique qui, avec la présence de leaders en services-conseils, de chefs de file du multimédia et de bonnes entreprises locales, telles que les Matrox, Eicon ou C-Mac, comporte déjà un noyau industriel significatif. Cependant, la question véritable réside davantage dans l'importance des fonds publics nécessaires pour concrétiser cet investissement. À ce chapitre, en fin de compte, c'est peut-être la proportion des fonds publics injectés dans le projet qui suscite le plus de question. Que les États contribuent par des incitatifs fiscaux, parfois par des prêts à taux d'intérêt préférentiel, par une aide à la recherche, à l'implantation de grandes entreprises de haute technologie, c'est une réalité de la vie. L'État de New-York ne vient-il pas d'annoncer une contribution de près d'un milliard de dollars, sous forme de congé fiscal surtout, à IBM, pour l'édification d'une importante usine de circuits électroniques près d'Albany ? Les gens d'affaires ne sont pas très partisans des interventions gouvernementales. Mais on doit reconnaître que de telles interventions, en dépit de règles plus serrées de l'Organisation mondiale du Commerce, demeurent monnaie courante surtout lorsqu'il s'agit d'attirer des investissements technologiques. | Dans le cas de Mosel Vitelic, on peut s'interroger sur le potentiel réel que revêt cet investissement. Le secteur technologique dans lequel il se situe est en mutation constante et l'obsolescence des produits est rapide. En outre, cette entreprise appartient au second quintile des entreprises de haute technologie dans le secteur des circuits, processeurs et semi-conducteurs. Il ne s'agit pas d'IBM, de Motorola ni d'Intel et elle se situe au septième rang mondial dans son domaine. Enfin, bien que l'entreprise semble financièrement saine et dynamique, certains de ses projets antérieurs n'ont pas connu tout le succès souhaitable. La participation de la SGF à hauteur de 47 % du capital-actions de la nouvelle entreprise ainsi que les avantages fiscaux actuellement garantis, par le gouvernement du Québec, de même que la contribution fédérale par le biais du programme Partenariat technologique canadien représentent donc un risque d'affaires réel. Nous souhaitons donc que l'entreprise elle-même démontre son propre intérêt en investissant substantiellement dans le projet. Néanmoins, ce projet ayant été souhaité, identifié et promu par les gouvernements eux-mêmes, celui d'Ottawa principalement, puis objet de démarches systématiques d'organismes de prospection des investissements comme Montréal International, il serait aujourd'hui peu avisé de s'en retirer. La Chambre espère seulement que la SGF compte sur une expertise suffisante pour évaluer la qualité technique du dossier dans lequel elle entend réaliser son premier partenariat majeur en dehors des domaines plus conventionnels où elle oeuvrait par le passé. Dans tout investissement, tant dans les secteurs conventionnels que dans les technologies de l'information ou d'autres technologies connexes, il existe un risque d'affaires. Puisque le gouvernement du Québec a déjà provisionné des investissements au sein de grands projets propres à créer des emplois et améliorer la structure économique du Québec, et qu'il a doté la SGF de moyens de devenir partenaire de projets majeurs, pourquoi cet argent ne serait-il pas consacré au projet Mosel Vitelic ? La Chambre de commerce du Montréal métropolitain compte au-delà de 7 000 membres. Sa mission première est de représenter les intérêts de la communauté d'affaires du Grand Montréal. Ses objectifs : être en tout temps pertinente pour ses membres, crédible auprès du public et influente auprès des gouvernements et des décideurs.
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