Entre Alain Bellemare, président de Bombardier, et Tom Enders, président et chef de la direction d’Airbus, le respect mutuel règne sans équivoque. La transaction relative aux avions de la C Series apporte un vent nouveau et la possibilité, selon M. Enders, de prendre 50 % du marché des avions monocouloir grâce à la complémentarité de l’expertise québécoise ainsi qu’au réseau et à la capacité de production d’Airbus.
Une leçon d’humilité à dimension humaine pour tout chef d’entreprise dont les enjeux, bien au-delà des chiffres, englobent de nombreuses familles. Un constat qui a marqué l’un des étudiants présents à la conférence.
« Il est important d'être fier de nos réalisations, mais il faut être capable de trouver du soutien lorsque nécessaire. Il ne faut pas laisser notre ego passer devant l'intérêt de nos employés, de leur famille et de nos actionnaires. »
- Francis Marois étudiant à la maîtrise en génie mécanique à l'UdeS et ambassadeur de l'UdeS au Regroupement Relève d'Aéro Montréal.
Recette gagnante : innovation, stratégie et pouvoir de vente
D’ailleurs, une semaine à peine après l’annonce du partenariat, le pouvoir de vente d’Airbus se manifestait déjà. Les prévisions de vente affichaient une hausse de 50 %. Une donnée qui parle d’elle-même, selon Alain Bellemare.
« Ce partenariat devrait plus que doubler la valeur du programme de la C Series et garantir que notre avion révolutionnaire réalisera son plein potentiel. »
Le président du géant de l’aéronautique est bien conscient de ne pas faire plaisir à tous et de faire peur à certains, considérant qu’Airbus prend le relais des avions de la C Series. Cependant, Tom Enders reconnaît sans peine la valeur du joyau québécois de l’industrie.
« Nous avons besoin de l'ingénierie qui vient avec la C Series. Personne ne doit avoir peur. Oui, nous allons avoir une usine en Alabama, mais nous allons stabiliser l'industrie ici. »
Il ne faut pas oublier le troisième joueur d’importance dans ladite transaction, soit le gouvernement du Québec. Le premier ministre Philippe Couillard était également présent lors de la conférence et a affirmé qu’avec cette transaction, le Québec tire son épingle du jeu. Il n’a pas caché non plus le fait que l’objectif a toujours été de trouver un partenaire stratégique, mais que le gouvernement devait intervenir pour sécuriser le secteur et les travailleurs.
Boeing devra s’incliner devant cette alliance
Airbus avait été approché en 2015, mais en raison de l’importance des enjeux, les négociations nécessitaient réflexion et planification stratégique.
Cependant, c’est grâce à cette démarche que Bombardier et Airbus ont pu joindre leurs forces au moment crucial où Boeing resserrait l’étau du marché américain. Car l’exigence de frais pour droits compensatoires ou antidumping de 300 % signait la fermeture de ce marché, un volet représentant 30 % des ventes pour les avions de l’entreprise québécoise.
En ouvrant une usine de fabrication à Mobile, en Alabama, Bombardier et Airbus pourraient contourner l’obstacle de taille et réaliser une économie d’échelle, entre autres grâce à la réduction des coûts de fabrication.
Delta Airlines a été rassurée par cette initiative et se dit impatiente d’intégrer les avions de la C Series à sa flotte. Elle est prête à attendre l’implantation de cette nouvelle chaîne d’assemblage pour concrétiser l’achat de 75 avions, une transaction freinée en 2016 à la suite de la plainte formulée par Boeing.
Quel est le point de vue de la relève?
Les étudiants et futurs leaders présents à la conférence ont compris et retenu d’importantes leçons de la part d’Alain Bellemare quant aux actions à poser en tant que chef d’entreprise lors d’une impasse.
Pour la relève, il est clair qu’Airbus et Bombardier tireront profit de cette association, car cette dernière assure la pérennité du programme C Series, crée une valeur ajoutée pour la gamme d’avions d’Airbus, augmentera le chiffre d’affaires des deux fabricants et fera profiter tout l’écosystème de fournisseurs de Bombardier des retombées économiques.
La participation des étudiants à cette conférence s’inscrit dans le cadre du programme Leaders de demain et a été rendue possible grâce à Power Corporation du Canada.