Pour beaucoup d’entreprises, un bouleversement majeur dans l’environnement d’affaires représente avant tout un risque qui peut créer de l’incertitude au moment d’investir. Parlez-en aux différents journaux d’Amérique du Nord, qui ont vu leurs revenus publicitaires diminuer de plus de 60 % au cours des dix dernières années, ou encore à l’industrie du vêtement face au phénomène de la délocalisation.
Pourtant, ce qui compte souvent, ce n’est pas uniquement l’environnement dans lequel une entreprise évolue, mais la façon dont ses gestionnaires l’abordent. Dans un marché en changement, il est possible de transformer son entreprise tout en préservant son ADN. L’important, c’est de savoir où on s’en va, de bien comprendre l’évolution de notre marché et de ne pas avoir peur de prendre des risques pour s’y adapter.
Voilà le message qui est ressorti de la présentation de Guy Crevier, président et éditeur de La Presse+, au Midi-conférence organisé par la Chambre de commerce du Montréal métropolitain mercredi dernier.
Oser prendre des décisions audacieuses
Pour mettre sur pied sa nouvelle plateforme, La Presse a procédé à une refonte en profondeur de plus de 20 systèmes de développement médiatique. Plus important encore, la décision d’offrir La Presse+ gratuitement était périlleuse pour une entreprise dont le modèle d’affaires était demeuré pratiquement inchangé en 130 années d’existence.
Toutefois, l’exemple de La Presse démontre qu’une prise de risque réfléchie peut facilement devenir une opportunité, et ce, sans pour autant avoir à renier la mission originale de l’entreprise.
En devenant disponible gratuitement, La Presse continue d’être un média de masse, dont l’objectif est de fournir à la population une information de qualité et un regard éclairant sur les enjeux de notre société. Cependant, ce changement permet de s’attaquer à la source du problème, c’est-à-dire la baisse constante de lecteurs de moins de 55 ans des médias traditionnels.
Des résultats qui parlent d’eux-mêmes
Peut-on dire que ces risques ont porté leurs fruits? En comparaison avec 2003, La Presse a réussi à maintenir 73 % de ses revenus, une proportion fortement supérieure à la moyenne de l’industrie. De ces revenus, plus de 88 % proviennent maintenant des contenus numériques. Et ces jeunes qui ne lisent plus les journaux? Lorsqu’on jette un coup d’œil au lectorat de La Presse+, on réalise que la proportion de lecteurs âgés de 18 à 54 ans est plus élevée que leur poids démographique dans la population québécoise. Bref, c’est mission accomplie.
La clé ici, c’est qu’au lieu d’être réfractaire au virage numérique, La Presse y a accompagné ses consommateurs. Loin de percevoir ce virage comme un fléau inévitable, elle l’a approché comme une occasion à saisir pour préserver ses parts de marché et atteindre de nouveaux lecteurs. Comme quoi la bonne approche, devant un bouleversement qui semble néfaste, peut mener en fin de compte à un renouveau.