L’appui à Bombardier ne doit pas compromettre sa propriété canadienne

Texte signé par Michel Leblanc, président et chef de la direction de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain et Françoise Bertrand, présidente et chef de la direction de la Fédération des chambres de commerce du Québec, et publié dans Le Devoir.

Le 27 avril 2016

L’appui à Bombardier ne doit pas compromettre sa propriété canadienne

La question de l’aide financière du gouvernement pour compléter le financement du programme  C Series suscite un vif débat au sein de la communauté d’affaires canadienne. Si l’on en croit ce qui est rapporté dans les médias, les négociations entre le gouvernement et Bombardier semblent soumises à des pressions d’influenceurs dont certains prônent la modification de la structure du capital-actions de l’entreprise. Or, ce geste poserait un grave risque pour le maintien de la propriété canadienne de ce leader mondial et créerait un précédent qui pourrait toucher d’autres fleurons de notre économie. C’est une erreur que le Canada ne peut se permettre.

Protéger Bombardier des acheteurs étrangers
Dans le contexte actuel, où le prix de l’action de l’entreprise et la valeur du dollar canadien sont bas, Bombardier et ses actifs représentent une cible de choix pour les grands avionneurs étrangers. Les actions à droit de vote multiple représentent l’un des seuls remparts face à cette possibilité et à l’activisme de certains actionnaires motivés par les gains à court terme. Transformer les actions à droit de vote multiple en actions ordinaires mettrait sérieusement à risque l’entreprise face à des offres d’achat hostiles. Les Canadiens doivent s’inquiéter des conséquences qu’aurait ce changement à la structure de gouvernance.  

Un gage de performance et de stabilité
Des études menées par PwC, 5i Research, l’Université de Toronto et IGOPP ont démontré que la performance boursière des entreprises contrôlées par des actions à droit de vote multiple est égale, sinon supérieure à celle des entreprises à contrôle diffus. La structure de gouvernance de Bombardier n’est pas le facteur responsable des défis auxquels l’entreprise a fait face au cours des dernières années. Ces défis sont plutôt liés aux conditions qui prévalent dans l’industrie aéronautique mondiale lorsqu’une entreprise entreprend un projet aussi ambitieux que la C Series. On peut même soutenir que la structure actuelle a permis aux gestionnaires de maintenir le cap sur la vision et les objectifs corporatifs à long terme, et ce, malgré un contexte d’incertitude.

Pourquoi risquer une entreprise si importante?
Bombardier est un fleuron de l’économie québécoise et canadienne. Cette entreprise phare reconnue internationalement génère des retombées économiques annuelles de plus de 12 milliards de dollars au Canada. Elle contribue de façon importante à la balance commerciale du pays avec des exportations totalisant 9,1 milliards de dollars en 2014. Les activités commerciales de Bombardier permettent le maintien d’environ 24 300 emplois au Canada. Sa contribution à la croissance économique du Canada ne fait aucun doute et cet apport doit continuer de croître.

Des mécanismes pour conserver le contrôle de nos entreprises
Nous prenons note que plusieurs voix qui prônent la modification de la structure du capital-actions de Bombardier proviennent du milieu financier de Bay Street. Or, il se trouve que les grandes banques à charte canadiennes qui représentent un des piliers économiques de Toronto jouissent de facto d’un mécanisme de protection face aux offres d’achat étrangères grâce à la Loi sur les banques, qui empêche un seul actionnaire de détenir plus de 10 % des actions. Une grande banque américaine ne pourrait pas s’emparer d’une grande banque canadienne. Nous estimons qu’il est tout autant dans l’intérêt du Canada de limiter le risque de perdre le contrôle canadien de Bombardier.
Bref, il faut sortir de ce débat, car est dans l’intérêt de tout le pays de voir ce fleuron mener à bien l’un des plus ambitieux projets d’innovation commerciale à avoir vu le jour au Canada au cours des dernières décennies.

 

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