Le 22 mars dernier, le ministre des Finances du Québec, Eric Girard, était de retour à la tribune de la Chambre pour la deuxième fois en trois mois. Il a poursuivi dans la tradition de ses prédécesseurs en venant présenter les grandes lignes du budget du Québec 2019-2020 aux gens d’affaires de Montréal.
Le ministre, économiste de formation et ancien trésorier de la Banque Nationale, était dans son élément. Il a pris le temps d’expliquer les différentes mesures prévues au budget et a su vulgariser des statistiques et prévisions comptables parfois complexes.
L’objectif à long terme du gouvernement du Québec est de hausser la croissance économique annuelle du Québec à 1,8 %, par rapport à 1,3 % actuellement. Selon le ministre, ce gain d’un demi-point de pourcentage pourrait faire du Québec une province plus riche de 13 % d’ici les 25 prochaines années. D’ailleurs, M. Girard a souligné que 17 % du budget est consacré à des mesures destinées à augmenter le potentiel à long terme de l’économie québécoise. La plus grosse part demeure toutefois les dépenses en éducation et en santé, qui accaparent 44 % du budget total.
Dans la préparation de son budget 2019-2020, le ministre a rencontré plus de 120 groupes et reçu des recommandations de 3 150 répondants dans le cadre des consultations prébudgétaires.
Voici quatre faits saillants de son allocution.
Quatre facteurs qui expliquent la bonne santé de l’économie du Québec
Le ministre Eric Girard a mis en lumière quatre facteurs qui expliquent les surplus budgétaires du Québec depuis quatre ans :
- La bonne performance de l’économie mondiale, qui profite en particulier aux économies ouvertes comme celle du Québec;
- Les transferts fédéraux, qui ont augmenté deux fois plus vite que les revenus autonomes du gouvernement du Québec au cours des cinq dernières années;
- La saine gestion des finances publiques du précédent gouvernement, que le ministre n’a pas manqué de souligner;
- Les taux d’intérêt bas, qui contribuent à diminuer les frais d’intérêts payés sur la dette du Québec.
Ces facteurs ont permis de dégager une marge de manœuvre récurrente de 2,3 milliards de dollars par année. Le ministre est d’avis que ce montant sera disponible chaque année.
Ces surplus ont permis au gouvernement d’avoir une plus grande marge de manœuvre pour financer le dénouement de certains dossiers prioritaires. À titre d’exemple, le ministre a mentionné le versement d’une compensation aux propriétaires de permis de taxi, la décontamination et la valorisation de terrains jugés stratégiques et les mesures d’atténuation mises en place pour soulager les usagers du train de banlieue de la ligne Deux-Montagnes, touchés par les travaux du Réseau express métropolitain.
Une équation pour guider le ministre
Le gouvernement souhaite stimuler les investissements des entreprises. Pour y arriver, il a mis en place des mesures concrètes. À l’automne, il a annoncé l’augmentation à 100 % du taux d’amortissement à l’égard de certains investissements. Il a aussi réduit le taux d’imposition effectif payé sur de nouveaux investissements.
Pour la suite, le ministre a mentionné son intention d’augmenter la participation au marché du travail en incitant les travailleurs expérimentés à retarder leur départ à la retraite. Il souhaite hausser les investissements en éducation, premier déterminant de la productivité. Il cherche aussi à réduire la dette du Québec. Selon lui, ces mesures contribueront à augmenter le PIB par habitant au Québec.
Au fil de sa réflexion, le ministre a établi une équation qui se veut en quelque sorte un guide pour atteindre l’objectif du gouvernement de créer de la richesse pour les Québécois.
L’équation du ministre Girard : stimuler les investissements des entreprises + augmenter la participation au marché du travail + hausser les investissements en éducation + réduire la dette = un Québec plus prospère.
Deux mesures clés pour l’emploi
Le gouvernement et le milieu des affaires s’entendent pour dire que l’enjeu de la pénurie de main-d’œuvre est une priorité pour l’économie du Québec. Le ministre a d’ailleurs souligné que le nombre de postes vacants s’élève actuellement à 117 000.
Eric Girard a profité de sa tribune pour exposer deux mesures clés, qui visent spécifiquement le maintien en emploi des travailleurs expérimentés, afin de s’attaquer à ce défi.
Le taux de participation du Québec dépasse celui de l’Ontario pour toutes les cohortes d’âges, sauf celle des 60 ans et plus (21 % contre 25 %). Selon M. Girard, l’atteinte d’un taux de 25 % représenterait 90 000 travailleurs de plus sur le marché du travail.
1re mesure : une bonification du crédit d’impôt incitatif pour poursuivre sa carrière. Dorénavant, les travailleurs de plus de 60 ans qui demeureront en emploi verront leur fardeau fiscal réduit de 1 500 $ pour les premiers 10 000 $ gagnés.
2e mesure : une réduction des charges sur la masse salariale des travailleurs expérimentés pour 34 000 PME. Le ministre a mentionné que souvent, à partir de 60 ans, les employés travaillent à temps partiel. Deux employés occupent l’équivalent d’un seul poste à temps plein. Cela implique que les PME doivent payer l’équivalent de deux charges. Cette nouvelle mesure vise à atténuer cette nouvelle réalité et est dotée d’une enveloppe de 100 millions de dollars. Elle pourrait être bonifiée si elle se montre efficace.
Objectif : rattraper l’Ontario et le reste du pays
Le ministre a présenté la trame de fond générale de son budget comme étant le début du rattrapage sur l’Ontario et le reste du Canada en matière de création de richesse. Le Québec est en retard à plusieurs égards, notamment en matière de productivité et d’investissements privés. Le ministre a reconnu qu’il faudra du temps, mais que son gouvernement s’engage à en faire une priorité.
Au Québec, la pression fiscale est de 37,3 %, alors qu’elle est de 32 % dans le reste du pays, a rappelé le ministre. De plus, le Québec est la deuxième province la plus endettée après Terre-Neuve. M. Girard a mentionné que la réduction du poids de la dette était une priorité et permettrait de dégager plus de marge de manœuvre budgétaire pour financer les services offerts.
Le Québec est sur trajectoire positive. Le ministre Girard estime qu’autour de 2024, le ratio de la dette par rapport au PIB du Québec sera inférieur à celui de l’Ontario et au même niveau qu’au fédéral. Lorsque cette cible sera atteinte, le gouvernement s’engage à réduire le fardeau fiscal des Québécois.