Pour ce premier épisode de notre série sur les talents de la CCMM, nous avons le plaisir de recevoir Élise Le Dref, directrice, Talents et diversité – Acclr, et Clémence Jaruga, cheffe, Talents et diversité – Mentorat. Elles sont venues nous parler de l’équipe Acclr – Talents et diversité, de leurs mandats et des convictions qui les animent dans leur mission au quotidien.
Quel est l’enjeu de l’heure dans votre secteur, celui qui vous occupe au quotidien?
Élise : En ce moment, on se concentre sur la gestion des obstacles à l’intégration, la gestion de la diversité et les questions linguistiques, notamment en ce qui concerne la francisation. La diversité, on a souvent tendance à réduire ça aux personnes immigrantes, mais c’est bien plus large. On doit travailler pour changer ces schémas de pensée vis-à-vis de la diversité et mieux comprendre les obstacles qui en découlent.
Clémence : Pensons par exemple aux questions de performance et de recrutement. Gérer la diversité dans ses équipes, c’est aussi repenser la normalité de la performance. Les gestionnaires doivent être capables d’adapter leurs grilles d’évaluation à la diversité de leurs équipes. Dans la même idée, lors d’un recrutement, on incite à ne plus seulement chercher « le bon fit » sur un poste, mais des personnes complémentaires de celles déjà présentes dans l’équipe. Ce sont des démarches plus complexes, mais qui se traduisent par plus de créativité et, au bout du compte, plus d’efficacité.
Élise : Tout ça repose sur des biais, des schémas auxquels on se fie parce qu’ils sont habituels dans le monde du travail. Je me souviens d’un recruteur qui ne regardait que les profils venant de la même université. Avec cette logique, on se limite dans ce que nos équipes peuvent apporter. La diversité, c’est synonyme de créativité, de résolution de problème et, ultimement, de productivité.
Concrètement, comment un gestionnaire peut-il mettre en pratique cette recherche de diversité?
Élise : Il faut repenser ses stratégies de recrutement, élargir ses canaux, sortir des plateformes traditionnelles. Dès l’élaboration de la fiche de poste, il faut réfléchir différemment pour attirer d’autres profils. Les employeurs avaient l’habitude de recruter dans leurs réseaux, mais la pénurie de main-d’œuvre change la donne.
Par exemple, il est courant de faire passer un test écrit en français avec une durée fixe. Pour ceux dont le français n’est pas la langue maternelle, ça peut être inadapté et représenter un défi supplémentaire. Il faut sortir de ces routines de recrutement qui reproduisent les mêmes biais et les mêmes inégalités. C’est comme ça qu’on arrivera à changer notre paradigme, à passer de l’égalité formelle à l’équité réelle.
Quelles sont les actions entreprises par la Chambre pour s’attaquer à ce défi?
Clémence : Je peux prendre l’exemple de Mentorat inc. C’est un programme qui joue sur plusieurs plans pour changer la dynamique et le rapport de force. Pendant deux mois, on accompagne un mentor et un mentoré au moyen de formations et d’un suivi personnalisé. Ce qu’on vise, c’est le développement de compétences des deux côtés, une culture d’aide réciproque. Petit à petit, on est convaincus que ce programme œuvre à la diffusion d’une mentalité plus inclusive dans les entreprises.
Aujourd’hui, ce qu’on montre aux entreprises, c’est qu’elles ont besoin d’adopter ces logiques. Un salarié sur deux pense quitter son emploi au Québec, 40 % des salariés veulent partir avant la fin de leur période d’essai. C’est beaucoup de temps et d’argent perdus pour les employeurs. Pour inverser ces tendances, il faut moderniser les façons de faire, travailler sur la valorisation interne, utiliser les outils à la disposition et promouvoir l’inclusion. Ça se répercute directement le bien-être et ça crée un cercle vertueux de maintien en emploi et de création de valeur.
Pour finir, quels conseils donneriez-vous aux employeurs et aux gestionnaires pour favoriser un climat plus inclusif, éthique et diversifié?
Clémence : Tout d’abord, il faut revoir les offres d’emploi en mettant l’accent sur une communication inclusive, tant à l’interne qu’à l’externe. Ensuite, j’insisterais sur la sensibilisation et la formation des gestionnaires et des employés. Commencer avec un bilan pour voir où on se situe, et ensuite être capable de faire émerger des solutions qui sortent des sentiers battus. Il faut que les gens découvrent des réalités qui ne sont pas nécessairement les leurs.
Élise : De manière générale, on favorise des approches au cas par cas. Une démarche inclusive, c’est une démarche respectueuse de l’individu. Chaque employeur, chaque gestionnaire, chaque employé a sa propre expérience et sa propre réalité qu’il convient de prendre en compte. C’est en considérant les spécificités de chacun qu’on peut faire de vrais progrès à l’échelle d’une organisation, quelle que soit sa taille.