La collaboration entre investisseurs, entrepreneurs et scientifiques contribue à la prospérité économique du Québec.
La pandémie de la Covid-19 a rappelé le rôle essentiel du secteur de la biotechnologie. Or, le Québec compte des chercheurs et entrepreneurs de talent dans plusieurs spécialités, de la neurologie à l'oncologie, en passant par les maladies rares et la cardiologie. Et des investisseurs d'ici croient que les sciences de la vie joueront un rôle économique de premier plan dans l'ère de l'après-coronavirus.
« La science est très forte au Québec et au Canada. Nous avons les outils pour nous positionner sur l'échiquier mondial. Mais la concurrence est féroce », prévient Geneviève Guertin, directrice des investissements en science de la vie au Fonds de solidarité FTQ.
L'institution investit environ 100 M$ par année en biotechnologie, répartis entre des prises de participation directes dans des sociétés et des investissements dans des fonds de capital-risque, qui sont présents au Québec ou qui lui offrent des retombées économiques.
« Bien sûr, les bonnes occasions n'arrivent pas toutes ficelées. Pour soutenir l'innovation dans les sciences de la vie, il faut une coordination entre les gens d'affaires, le monde scientifique et les investisseurs », dit Geneviève Guertin.
Le triangle de la réussite
En effet, si le bâton de la relève revient aux entrepreneurs, encore faut-il qu'ils soient mis en contact avec des découvertes aux applications prometteuses, et avec le capital pour les financer. Or la communication n'est pas toujours fluide entre ces trois univers.
« Chacun doit faire un pas vers les deux autres. Les investisseurs comme nous doivent s’intéresser à la recherche et l'entrepreneuriat, les scientifiques doivent pouvoir identifier des applications commerciales à valeur ajoutée, et les entrepreneurs ont besoin d'accéder à l'innovation. Ils forment un triangle indissociable », explique Geneviève Guertin.
Justement, le gouvernement du Québec a annoncé cet été la création d’un nouvel organisme de valorisation de la recherche publique afin de solidifier les ponts entre les parties prenantes.
« Cette décision va simplifier la collaboration entre les scientifiques et les entrepreneurs, et peut-être même inspirer davantage les vocations commerciales dans le monde académique », entrevoit Didier Leconte, vice-président aux investissements en sciences de la vie et gestion des fonds au Fonds de solidarité FTQ.
Comme dans tout secteur industriel, la relève des entrepreneurs est essentielle à la croissance future. Or, il peut être difficile pour les nouveaux venus d'obtenir du financement. D'où l'importance du fameux triangle évoqué par Mme Guertin.
« Il ne fait nul doute que les entrepreneurs de grande renommée attirent facilement l'attention des investisseurs. Il faut surtout s'assurer que l'environnement permette aussi, par exemple, à des scientifiques de se lancer en affaires », plaide-t-elle.
De l'argent, mais aussi des idées
L'intérêt envers le secteur est plus fort que jamais. Au premier semestre 2020, malgré la pandémie, ou peut-être à cause d'elle, les investissements en sciences de la santé au Canada se sont chiffrés à 722 M$, contre 586 M$ dans la même période en 2019 (source : CVCA). Le total comprend aussi bien des grosses transactions que des plus modestes. C'est sans compter les nombreux premiers appels à l'épargne publique observés depuis le début de l’année au Canada, notamment ceux de Repare et Fusion qui ont permis l’injection de plus de 560 M$ au total dans ces deux entreprises.
« On entend souvent dire qu'on manque de capital, mais le système, à part certaines portions bien précises, reste bien financé. Il n'y a pas de crise de liquidité dans le marché. Pour nous, une des pistes prioritaires est de mieux travailler avec les entrepreneurs et les chercheurs pour avoir accès à la science. Faute de collaboration, on n’optimisera pas la création de richesse à partir de l’innovation », pense Geneviève Guertin.
Une solution parmi d'autres : impliquer davantage les investisseurs dans les conseils consultatifs des entreprises, ou dans la société de valorisation. Et ne pas avoir peur de prendre des risques – c'est pour la bonne cause.
« Les gens réalisent l'importance de la biotechnologie, et on a la chance d'avoir au Québec des chercheurs qui travaillent sur la Covid-19. Il y a quelques années, Gary Kobinger de l'Université Laval a contribué à développer le vaccin contre l'Ebola », rappelle Didier Leconte. « Pour nous il s'agit d'investissement d'impact, car on participe à améliorer la santé des gens. »